11 leaders des déplacées internes vont en guerre… contre les violences basées sur le genre.

Photo de l'ensemble des déplacées internes participantes à la formation

Depuis plus de 4 ans, les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun sont en proie à une crise. En plus de faire plusieurs morts, cette crise a déjà entrainé le déplacement de plus de 500 000 personnes vers les autres régions. Bafoussam, capitale de la Région de l’Ouest, est l’une des villes qui accueille le plus de personnes déplacées internes, du fait de sa proximité avec la Région du Nord-Ouest.

Laetitia fait partie de ses déplacées internes qui ont dû élire domicile dans une nouvelle ville. Elle est originaire de Batibo dans le Nord-Ouest. Elle est mère de deux enfants et est arrivée à Bafoussam il y a 3 ans. Tout comme les autres déplacées internes, l’arrivée et l’accueil n’ont pas été de tout repos. En plus des railleries et des menaces subies de la part d’autres habitants de la ville, elle a dû affronter le fait de ne pas avoir de logement où dormir, trouvent refuge dans les cuisines externes ou sur les vérandas des maisons durant les nuits glaciales. L’évènement le plus choquant a eu lieu quand elle a été violée et dépouillée de la recette du bar où elle avait pu trouver un job qui lui permettait d’espérer un avenir meilleur.

 

Les participantes à la formation

 

Tout comme Laetitia, plusieurs autres femmes et filles déplacées internes du Nord-Ouest font face à d’énormes difficultés et à des violences, mais elles n’osent pas en parler et préfèrent souffrir en silence. Elles ont été recensées lors de l’étude menée par Horizons Femmes dans le cadre du projet de Mobilisation Sociale et communautaire pour la réduction des Violences Basées sur le Genre (VBG) en direction des femmes et filles déplacées de la crise anglophone dans la Région de l’Ouest au Cameroun. Ce projet est mis en œuvre jusqu’en décembre 2021 avec l’appui de African Women’s Development Fund (AWDF).

Laetitia a été sélectionnée pour faire partie des 11 leaders des déplacées internes et 05 leaders communautaires qui ont été formé.e.s dans le cadre de ce projet par Horizons Femmes. Ladite formation consistait en un renforcement de leurs capacités sur les notions de VBG, sur les mécanismes de prévention et de réponse et sur les mesures prises par le gouvernement et les acteurs de la société civile en faveur des survivantes des VBG.

Selon la Présidente Exécutive de Horizons Femmes, pendant ces deux jours, il était question d’édifier les participant.e.s, afin qu’ils.elles puissent aller dans leurs communautés pour sensibiliser leurs pairs sur les disponibilités mises sur pied par le gouvernement et les acteurs de la société civile afin de les accompagner. Son souhait est que les autorités s’approprient le projet et que les jeunes filles déplacées internes comprennent les enjeux du projet et sollicitent les services disponibles dans ce projet. Ces services gratuits comprennent notamment un soutien psychosocial, un appui médical, un appui et un accompagnement juridiques, mais également un appui pour l’établissement des pièces d’identité telles quel Carte Nationale d’Identité et l’acte de naissance.

 

La Présidente Exécutive de Horizons Femmes face à la presse

 

Les différents modules de formation ont permis aux participant.e.s d’être suffisamment outillé.e.s pour la suite des activités. « Par la suite, des théâtres communautaires seront organisés. Nous allons monter des sketchs en lien avec la lutte contre les VBG », précise le chef de projet sur la suite des activités du projet.

Afin de se préparer au mieux pour la représentation de ces sketchs, des simulations ont été faites durant la formation, supervisées par un scénariste. Le but était d’identifier parmi les leaders celles qui pouvaient se démarquer avec des talents d’acteurs. Des séances de répétitions seront organisées par la suite et au moins 4 théâtres communautaires seront organisés dans les différents quartiers de la ville.

A la fin de la formation, ces leaders formées se disent prêtent à œuvrer pour la réduction de 30% des VBG en direction de leur communauté d’ici à la fin du projet. Certaines d’entre elles ont tenu à exprimer ce qu’elles ressentent après avoir reçu une telle formation.

 

Le scénariste plantant le décor pour les jeux de rôle

 

« Je voudrais remercier Horizons Femmes pour cette réunion parce qu’avant j’avais beaucoup de blocages. Après la réunion de ces deux jours, je peux déjà aller aider les autres filles dans les quartiers car elles sont nombreuses qui sont violentées au quotidien. Avant, on pouvait être battu nuit et jour par son mari ou son petit ami, sans réagir et tout en restant silencieuse. Désormais, on sait vers qui se tourner et quoi faire.  Je suis contente d’avoir appris toutes ces choses ici » affirme Laetitia, dans un pidgin qui laisse entrevoir le langage qui sera utilisé par elle pour s’entretenir avec ses pairs sur le terrain.

Fidoline, une autre leader ayant pris part à la formation, semble désormais plus sûre d’elle. « J’ai appris les différents types de violences qui existent. J’ai également appris que bien que je sois une étrangère dans cette ville, je ne dois avoir peur de personne car j’ai droit à la vie et à la sécurité en tant qu’être humain. En plus je suis camerounaise et je suis chez moi partout au Cameroun » tient-elle à préciser.

« Nous vivions dans la dépression à cause de la guerre. Moi particulièrement j’ai été très affectée par cette guerre. J’ai vu mon mari être menacé de mort par une arme à feu dans notre maison. Je vous remercie d’être venu nous chercher au fin fond des quartiers pour qu’on puisse participer à cette réunion, c’est vraiment un grand pas déjà. Nous nous sentions seules et abandonnées ici à Bafoussam. A partir de demain, on pourra déjà retransmettre à nos familles et nos voisins ce que nous avons retenu d’ici. Ce projet est une bonne chose pour toutes les personnes violentées, notamment pour les adolescentes qui sont violées et qui n’osent pas parler. Je pense que nos actions von permettre de limiter des violences. » témoigne « Blaiso », une amie de Laetitia qui a également pris part à la formation et dont la voix est pleine d’émotions.

Laetitia et les dix autres leaders sont désormais engagées dans la mise en place des sketchs de sensibilisation qui seront joués lors des théâtres communautaires devant les membres de leurs communautés et les autorités.  Le but est de passer les messages souhaités en jouant des scènes réelles vécues par les IDP, tout en présentant les opportunités et les services à elles offertes par le gouvernement, les ONG et associations, au premier rang desquelles Horizons Femmes.

 

Cédric NOUMBISSIE – Horizons Femmes

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