LE THEATRE COMMUNAUTAIRE AIDE A SENSIBILISER LES POPULATIONS DEPLACEES INTERNES SUR LES VIOLENCES A BAFOUSSAM

Théâtre communautaire à Bafoussam

La ville de Bafoussam, capitale de la Région de l’Ouest, est située à une centaine de kilomètres de Bamenda, capitale de la Région du Nord-ouest, une des régions où sévit la crise sécuritaire actuelle au Cameroun. Bafoussam est l’une des villes qui accueille le plus grand nombre des déplacées internes de cette crise. On note ainsi depuis le début de la crise, une recrudescence des populations anglophones dans cette ville. Cette augmentation est parallèle à celle des violences envers cette population.

Afin de sensibiliser et d’informer la communauté des déplacés internes sur les types et les formes de violences auxquelles elles font face, ainsi que sur les opportunités que s’offrent à elles pour faire face à ces violences, Horizons Femmes a organisé le 14 juin 2021, la première représentation de théâtre communautaire. Cette représentation marque la fin d’une formation des apprentis actrices issues de cette communauté et vivant à Bafoussam.

La manifestation, qui s’est tenue dans une des salles de fête d’un hôtel de la ville a rassemblé 118 personnes, qui se sont réunies pour un descriptif grandeur nature des formes que prennent les violences subites par les femmes et filles déplacées de la crise dite anglophone. Psychologiques, physiques, sexuelles, économiques, telles sont autant de formes que revêtent ces violences et qui ont été passées en revue par les actrices sur la scène.

Une centaine de personnes a assisté à la représentation

 

Ces actrices sont issues de la communauté de la cible à sensibiliser. Elles sont les témoins vivants et les survivantes des violences subies par celles qui ont fui leurs domiciles et villages pour venir chercher sécurité et réconfort dans une autre ville. Elles sont 11 leaders qui ont bénéficié d’une formation sur les types de violences, les mécanismes de réponse et les opportunités offertes à la fois par l’Etat et par les Organisations de la Société Civile, au premier rang desquelles Horizons Femmes. A la suite de cette formation, des thèmes de sensibilisation ont été identifiés. Le scénariste recruté dans le cadre du projet avait pour mission de décliner chaque thème en pièce de théâtre.

Toutes les actrices faisaient du théâtre pour la première fois, mais le travail abattu avec le scénariste a visiblement porté ces fruits, en témoignent l’intérêt porté par le public lors du jeu, la salve d’applaudissements à la fin de la représentation et les réactions des uns et des autres.

Cette première représentation racontait les histoires de deux femmes déplacées internes qui dorment dans un immeuble en construction et qui, après avoir passé plus de trois jours sans manger, décident de tout faire pour avoir de l’argent. L’une décide d’être travailleuse de sexe, tandis que la seconde, Patience, est envoyée, par la femme propriétaire de l’immeuble et qui les avait chassées quelques jours auparavant, travailler comme femme de ménage chez un couple dont le mari est alcoolique et violent envers sa femme. Lors d’un déplacement de la femme, le mari en profite pour abuser sexuellement de Patience, après de nombreux refus à ses avances et son chantage, au point de la mettre enceinte. Une fois la femme au courant, elle la bat et la met à la porte. Elle est livrée à elle-même mais tombe sur son amie avec laquelle elle dormait dans l’immeuble inachevé. La vie de cette dernière s’est transformée depuis leur séparation. Elle a été approchée par Horizons Femmes lors d’une descente d’identification des déplacées internes dans les sites de travail de sexe. Elle a bénéficié des conseils d’un psychologue, ses examens médicaux ont été faits gratuitement, elle a reçu un appui pour l’établissement de sa carte d’identité et grâce au partenariat avec le Fonds National de l’Emploi, elle a pu trouver un travail. Elle est désormais épanouie et décide d’aider Patience qui a subi plusieurs formes de violences.

 

Trois protagonistes du sketch

 

Presque toutes les personnes du public se sont reconnues, ou ont reconnu la situation de leurs proches dans cette histoire. Ceci est notamment dû au fait que les actrices sont toutes issues de leur communauté. Le théâtre a été choisi comme outil de sensibilisation pour faire passer le message de manière divertissante, allant bien au-delà des moyens d’information traditionnels utilisés dans le cadre des projets de développement. En effet, le théâtre communautaire va au-delà du théâtre classique qui était perçu comme un instrument de développement social et un moyen d’exprimer les croyances, la douleur et la souffrance. Le théâtre communautaire provient de la communauté et peut l’aider à améliorer ses capacités de réflexion critique sur les violences et autres réalités vécues au quotidien.

« Le sketch qui a été joué par nos sœurs aujourd’hui recense exactement les difficultés auxquelles nous faisons face au quotidien. Moi, par exemple, j’ai demandé à une femme de me louer son espace pour que je puisse faire de l’agriculture. J’y ai mis mon temps et mon énergie, mais une fois qu’elle a vu les résultats du travail, elle a décidé de me chasser de son champ en me disant de retourner d’où je viens » explique Maryce, une spectatrice su sketch.

« Je suis contente du sketch que vous avez joué car c’est vraiment la réalité que vivent plusieurs jeunes déplacés internes, en particulier les filles, pas seulement à Bafoussam, mais dans d’autres villes. Ce sketch a permis d’ouvrir les yeux sur une réalité qui est cachée. Ça va donner le courage aux gens de parler et de dénoncer les violences qu’ils subissent parce que désormais ils savent que s’ils parlent, ils peuvent bénéficier d’une assistance. Donc, c’est encourageant » affirme une autre participante.

La troupe théâtrale

 

Cette représentation théâtrale est la première d’une série de quatre prévues dans le cadre du projet de Mobilisation sociale et communautaire pour la réduction des Violences Basées sur le Genre (VBG) en direction des femmes et filles déplacées de la crise anglophone dans la région de l’Ouest du Cameroun. Ce projet fait partie d’efforts plus larges de Horizons Femmes pour contribuer à l’amélioration des conditions de vie des personnes qui ont dû fuir la crise pour se réfugier dans d’autres villes. Ce projet est mis en œuvre avec l’appui de African Women’s Development Fund (AWDF).

 

Cédric NOUMBISSIE – Horizons Femmes

Action solidaire

Nous soutenir

Vous souhaitez Soutenir l’ONG dans ses activités, cliquer sur ce bouton
Nous soutenir

Évènements

compteur

Je m’abonne à la Newsletter

Recevez régulièrement l’actualité de
" Horizons Femmes "